- Ed Wige
Malley en textes
Malley en textes, c’est une envie de (ra)conter un quartier bigarré, insaisissable et en pleine mutation.
Malley en textes, c’est de nombreuses questions : le quartier existe-t-il vraiment ? Peut-on parler d’une communauté ? Qui sont ses habitant-e-s ? Pourquoi sont-ils et elles attaché-e-s à ce quartier ?
Malley en textes, c’est une des suites de la réflexion menée par un groupe d’étudiants du CAS Projets urbains et pouvoir d'agir et de plusieurs réunions d’habitant-e-s du quartier.
Malley en textes, c’est des instantanés qui vont apparaître de temps en temps (ou pas), au gré des saisons et des envies.

Le Malley-ze
Tu nous habites mais on a du mal à te saisir, Malley. Ecartelé entre trois communes, tu es parfois Prilly ou Renens, ou encore Lausanne, mais jamais les trois à la fois.
Nous, tes habitant-e-s, nous ne savons pas sur quel pied danser, toi qui nous fait tanguer au rythme des voitures, des trains, des bus, des constructions, de la Galicienne et des supporters du LHC. Ta musique industrielle, répétitive, qui ne s’arrête jamais, nous fait marcher.
C’est que tu es plein de surprises que les pouvoirs locaux peinent à dévoiler, Malley. Certains votent sur des objets lointains, d’autres – en première ligne – ne votent pas. Le découpage est le découpage… on ne plaisante pas ! Des terrains de foot qui disparaissent, des parcs qui apparaissent, des projets gigantesques qui transparaissent, au détour d’une ruelle ou d’une conversation.
Nous, tes résidant-e-s, sommes à ton image, Malley. Nous sommes beiges, jaunes, roses, amandes et tous les mélanges possibles de ces teintes. Nous sommes originaires de Suisse, d’Italie, du Portugal, d’ex-Yougoslavie, de France, d’Allemagne, d’Inde, de Chine, d’Erythrée, du Cameroun, du Congo, de Syrie, d’Afghanistan et de bien d’autres pays aussi. Nous sommes établi-e-s depuis des années ou juste de passage. Nous sommes aisé-e-s ou à l’aide sociale. Nous vivons seul-e-s ou à plusieurs. Comme toi, nous sommes pluriel-le-s.
Nous aimons ton côté pratique, Malley. Tu nous offres tout et toutes les commodités sont à deux pas. Tu affiches fièrement tes offrandes en lettres majuscules et bariolées. On ne peut pas les louper. Et quelque fois, nous nous imaginons grands citadins! Si seulement tu nous offrais plus de culture, des espaces de rencontre, de la verdure et – soyons fous – des toilettes publiques aussi (le grand citadin a aussi des besoins)!
Mais ne te fais pas d’illusions, Malley – non, nous ne te trouvons pas beau. Tu es trop bétonné, trop rectiligne, trop gris, trop métallique, trop en friche, trop congestionné pour pouvoir obtenir le prix de la beauté. Tu transpires aussi la testostérone, Malley. Tu stationnes des hommes ici et là, tu les régurgites dans certaines rues, à certaines heures, tu les stockes dans les PMUs et les bars du coin. En somme, tu oublies parfois la moitié d’entre nous.
Alors même si notre attachement est réel, Malley, il te reste encore des efforts à faire pour nous combler.