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  • Ed Wige

Loin de chez soi : lecture-performance sur le thème de la migration à Bienne


A l’occasion du colloque annuel de l’Association suisse pour l’orientation universitaire, le 25 janvier 2018, quatre auteurs ont réalisé et lu des textes sur la migration, sous la direction de Michael Stauffer. Qu’est-ce que l’immigration ou l’émigration ? Les deux vont–elles de pair ? Qu’est-ce que l’intégration ? Des questions qu’ils et elles ont abordées en français, allemand, suisse-allemand, serbo-croate ou anglais, en jouant avec les idées reçues et les clichés.

Extraits des textes rédigés par Ed Wige :

Willkommen in der Schweiz

Švajcarska. Die Schweiz. Svizzera. La Suisse. J’en avais beaucoup rêvé. Moi, où peut-être, mes parents. Aujourd’hui que j’y suis, je ne sais pas trop quoi en penser. Les couleurs, les odeurs, les gens. Tout est différent de là où je suis née. Il fait toujours un peu froid ici, si ce n’est pas le temps, quelques fois, ce sont les gens. Puis les réflexions :

– "Non, non, ne dis pas que tu viens des Balkans. Dis plutôt que t’es Italienne, ça passerait mieux. »

Ou aussi :

– "Vous êtes tous un peu violents par là-bas. Ça doit te faire bizarre d’être en Suisse maintenant. Ça va, tu t’y fais ?",

– « Ici, c’est la Suisse. Il va falloir faire les choses différemment que chez vous. Ici, il y a des règles qu’il faut suivre…»,

– « Si on t’embête, surtout ne réponds pas. Il faut qu’on réussisse à s’intégrer à tout prix ! ».

Heureusement, à partir de 2001, les Yougos redeviennent fréquentables, comme les Italiens et les Portugais quelques années plutôt. Le curseur s’est déplacé un peu plus au sud, vers la Méditerranée. Ce n’est plus moi qu’on questionne au passage de la frontière, et ce malgré ma double nationalité dûment acquise.

Et puis, des années après, d’un voyage à l’autre, loin de la Suisse pour des études ou le travail, à l’étranger avec des étrangers, où je suis à leurs yeux Suisse avant tout, ce sont les couleurs, les odeurs et les gens de Suisse qui me manquent.

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Éplucher le cliché

- Moi, je suis American et toi?

- Je suis Suisse.

- Ah Sweden, j’ai toujours rêvé de visiter le pays. Les Suédoises, le père Noël, la beauté des paysages!

- Non, Suisse. Je suis Suisse.

- Ah – Swiss, comme le Swiss cheese, le fromage qu’on trouve dans les supermarkets?

- Moi, je suis Suisse et toi?

- Je suis Suisse, Serbe, Croate et Bosniaque. La guerre c’est pratique pour collectionner les nationalités. Mais étant mariée à un Français, j’hésite à demander la nationalité française aussi. Je vais attendre de rentrer des Etats-Unis, où je travaille en ce moment, pour lancer les démarches.

- Moi, je suis Allemand et toi?

- Je suis Suisse. Mais, les Allemands, je connais bien. Il y en a plus de 300'000 en Suisse – 3.5% de la population. Et plus de 60'000 traversent la frontière au quotidien pour y travailler. Donc, je connais – mais pas tous, bien sûr, ils sont trop nombreux.

- Ah, oui – c’est bien... Moi non plus, je ne connais pas tous les Suisses habitant l’Allemagne. Mais par chance, je t’ai connu toi…

- Moi, je suis Serbe et toi?

- Tu es Croate ?

- Non, Serbe.

- Ah, oui – Albanais ou Kosovar ? C’est pareil, non ?

- Non, Serbe…

- Ah, ok – c’est bien. Moi, je suis Suisse.

- Ah la Suisse, c’est un bon pays ! C’est propre, le chocolat, les belles voitures, les banques. Et c’est un peu comme si on était à la maison – on y trouve de l’ajvar, de la pita, des sarma, des ćevap. C’est dommage qu’il y ait autant de gens d’ex-Yougoslavie…

- Moi, je suis Français et toi?

- Je suis Suisse.

- La Suisse, c’est beau! Quand il n’y a pas le feu au lac.. ah ah, je rigole, je rigole. Par contre, ça magouille pas mal, non ? Le secret bancaire, la fiscalité des entreprises, le trading des matières premières… Et puis avec l’Union européenne, vous voulez un peu le beurre et l’argent du beurre, non ?

- Ich komme aus Zürich und du?

- Je suis Vaudoise.

- Der Süden des Landes ist echt schön! Da gibt es die Sonne, das gute Essen und diese Sorglosigkeit, ein wenig naiv.

- C’est sûr que c’est un peu moins psychorigide de notre côté de la barrière de Rösti. Heureusement qu’il y a la Coopé, la Migros et puis la SSR pour nous unir. Pourvu que ça dure !

- Moi, je suis Italiano et toi?

- Je suis Suisse.

- Ah si, la Svizzera. Vous êtes pas commodes avec les frontaliers – la préférence indigène, il dovere de montrer son casier judiciaire, la pasta tropo cotta. D’ailleurs, l’affiche des moutons noirs, c’était chez vous, non ?

- Moi chuis Vaudois et toi?

- Je suis Genevois.

- Le jet d’eau ! La G’nève internationale ! La République de G’nève ! Le lac de G’nève ! Quatre-vingt, quatre-vingt-dix ! Le canton enclavé dans la France ! Genève, c’canton qui a un petit pied en-dedans et un grand en-dehors de la Suisse, hein ?

#LecturesPerformances

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