- Ed Wige
Chroniques festives

« Le Père Noël, cet ordure », de Rudolphe Rondin
« À mort le Père Noël » c’est sur ces mots que Rudolphe Rondin ouvre de manière provocante son premier livre, mélange de récit personnel et d’enquête rocambolesque, à mettre dans toutes les demeures sans sapin. Rondin est né à Montcuq, dans une commune de 1200 habitants au sud de la France, une petite localité que le Père Noël a intentionnellement contournée pendant de nombreuses années. Pourquoi, comment et grâce à quels stratagèmes ? – voici donc les questionnements de départ du livre. En plus de son expérience personnelle, qu’il raconte de manière bouleversante, Rondin a étoffé son livre de coupures de presse, de témoignages divers et de photographies qui témoignent sans conteste du mépris de l’homme à la barbe blanche pour les petits coins perdus de ce monde. Néanmoins, Rondin n'est pas du genre à s’apitoyer sur le passé. Cet enragé de l’équité met en scène les différents moyens de se rendre justice et propose de manière ludique et illustrée les différentes façons de faire mourir l’homme habillé tout de rouge et de blanc. Une prouesse d’inventivité !
« Stratagèmes de survie lors d’un dîner de Noël », d’Alice Croustade
De retour de Pamukalie, Estelle Joyeux redécouvre les joies du réveillon de Noël qu’elle n’a pas fêté depuis plus de quinze ans. Le soir du 24 décembre 2017, elle se voit bourrée de saumon, engraissée de foie gras, gavée de chapon, saupoudrée de fromage, puis noyée dans diverses mixtures d’alcool à bulles. Une soirée qu’elle finit aux urgences où on lui diagnostique de multiples AVC. On ne l’y reprendra pas deux fois, se jure Estelle lorsqu’elle se rend compte qu’elle est toujours en vie ! Elle s’évertue à développer pendant les 364 jours suivants une méthode de survie pour toutes les personnes qui subiraient les mêmes acharnements et traitements inhumains de la part de leur famille. De la serviette de table ultra absorbante, au collier que l’on peut remplir de pâté, jusqu’au chien que l’on affame pendant un mois puis que l’on place stratégiquement à ses pieds, la jeune femme cherche à survivre à tout pris. Dans ce roman, Alice Croustade met des mots sur une décadence collective, celle de la famille, celle de l’Occident aussi. Elle dépeint avec une grande sensibilité et beaucoup d’ironie le monde consumériste d’aujourd’hui. Au-delà de la fiction, la romancière nous donne aussi quelques idées pour affronter plus sereinement le marathon culinaire à venir. Un livre qui mériterait les trois étoiles littéraires.